Bilan 2001 des changements climatiques :
Les éléments scientifiques

Autres rapports dans cette collection

F.3 Projections pour l’évolution future de la température

Résultats fournis par les modèles de la circulation générale couplés atmosphère-océan (MCGAO)


Figure TS 20 — Variation annuelle moyenne de la température (zone colorée) et sa plage (isolignes) (Unité: °C) pour le scénario A2 du SRES (partie supérieure) et le scénario B2 du SRES (partie inférieure). Les deux scéanarios du SRES indiquent la période 2071 à 2100 par rapport à la période 1961 à 1990 et ont été appliqués aux MCGAO. [Basée sur les Figures 9.10d et 9.10e]

Figure TS 21 — Analyse de la concordance du réchauffement régional relatif entre les différents modèles (réchauffement par rapport au réchauffement moyen mondial de chaque modèle). Les régions sont classées comme affichant soit un accord sur un réchauffement de plus de 40 % au-dessus de la moyenne mondiale ("Nettement supérieur au réchauffement moyen"), soit un accord sur un réchauffement supérieur à la moyenne mondiale ("Supérieur au réchauffement moyen"), soit un accord sur un réchauffement inférieur à la moyenne mondiale ("Inférieur au réchauffement moyen"), soit un désaccord entre les modèles sur l’ampleur du réchauffement régional relatif ("Désaccord sur l’ampleur du réchauffement"). Il y a aussi une catégorie pour un accord sur le refroidissement (qui ne se produit jamais). Il faut un résultat concordant entre au moins sept des neuf modèles pour qu’il y ait accord. Le réchauffement mondial annuel moyen des modèles utilisés varie de 1,2 à 4,5 °C pour le scénario A2 et de 0,9 à 3,4 °C pour le scénario B2, de sorte qu’une amplification régionale de 40 % représente des gammes de réchauffement de 1,7 à 6,3 °C pour le scénario A2 et de 1,3 à 4,7 °C pour le scénario B2. [Basée sur le Chapitre 10, Encadré 1, Figure 1].
Figure TS 22 — Résultats d’un modèle simple : a) projections de la température moyenne mondiale pour les six scénarios illustratifs du SRES, établies à l’aide d’un modèle de climat simple accordé à un certain nombre de modèles complexes avec un ensemble de valeurs de sensibilité du climat. Egalement à titre de comparaison, on présente les résultats obtenus pour le scénario IS92a en appliquant la même méthode. La zone sombre représente l’enveloppe englobant l’ensemble complet des trentecinq scénarios du SRES utilisant la moyenne des résultats du modèle (la sensibilité moyenne du climat est de 2,8 °C). La zone à coloration plus claire représente l’enveloppe fondée sur les sept projections du modèle (avec une sensibilité du climat comprise entre 1,7 et 4,2 °C). Les barres indiquent, pour chacun de six scénarios illustratifs du SRES l’ensemble des résultats obtenus à l’aide du modèle simple pour 2100 selon les sept modèles MCGAO. b) Même que a) mais des résultats obtenus à partir de l’estimation historique du forçage anthropique sont également utilisés. [Basée sur les Figures 9.14 et 9.13b]
La sensibilité du climat devrait être de l’ordre de 1,5 à 4,5 °C. Cette valeur estimée reste inchangée depuis le premier Rapport d’évaluation du GIEC (1990) et le deuxième Rapport d’évaluation. La sensibilité du climat désigne la réaction, à l’équilibre, de la température à la surface du globe à un doublement de la concentration d’équivalent CO2. La fourchette des températures estimées est due aux incertitudes des modèles climatiques et à leurs rétroactions internes, notamment celles qui sont liées aux nuages et autres phénomènes apparentés. La réponse climatique transitoire (RCT) est utilisée pour la première fois dans le présent rapport du GIEC. La RCT se définit comme moyenne mondiale de la variation de la température de l’air en surface au moment du doublement de la teneur en CO2, dans le cas d’une expérience d’accroissement de 1 pour cent par an du CO2. On présume que ce taux d’accroissement du CO2 représente le forçage radiatif dû à tous les gaz à effet de serre. La RCT combine des éléments liés à la sensibilité des modèles et des facteurs qui influent sur la réaction (par exemple l’absorption de chaleur par les océans). Pour les MCGAO actuels, la RCT se situe entre 1,1 et 3,1 °C.

La prise en compte de l’effet direct des aérosols sulfatés réduit le réchauffement moyen de la planète prévu pour le milieu du XXIe siècle. Les configurations de la réaction de la température en surface pour un modèle donné avec et sans aérosols sulfatés sont plus semblables entre elles que celles que l’on obtient avec deux modèles différents utilisant le même forçage.

Les modèles prévoient certaines variations de plusieurs variables climatiques de grande échelle. Lorsque le forçage radiatif du système climatique change, les terres émergées se réchauffent plus vite et davantage que les océans, et il s’ensuit un réchauffement relativement plus marqué aux latitudes élevées. Les modèles prévoient une élévation inférieure à la moyenne mondiale de la température de l’air en surface dans l’Atlantique Nord et les zones océaniques circumpolaires de l’hémisphère Sud ainsi qu’une diminution de l’amplitude diurne de la température dans de nombreuses régions, les minima nocturnes augmentant davantage que les maxima diurnes. Un certain nombre de modèles font apparaître une diminution générale de la variabilité quotidienne de la température de l’air en surface en hiver et une augmentation de la variabilité quotidienne de cette température en été dans les zones continentales de l’hémisphère Nord. A mesure que le climat se réchauffe, les modèles prévoient un recul de la couverture neigeuse et de l’étendue des glaces de mer dans l’hémisphère Nord. Nombre de ces changements sont conformes aux observations récentes, comme il est indiqué dans la section B.

On utilise des ensembles multimodèles de simulations MCGAO fondées sur différents scénarios pour évaluer le changement moyen du climat et l’incertitude sur la base de la fourchette des résultats des modèles. Pour la fin du XXIe siècle (2071 à 2100), l’élévation moyenne de la température moyenne de l’air à la surface du globe, par rapport à la période 1961-1990, est de 3,0 °C (avec un intervalle de 1,3 à 4,5 °C) pour le projet de scénario de référence A2 et de 2,2 °C (avec un intervalle de 0,9 à 3,4 °C) pour le projet de scénario de référence B2. Le scénario B2 donne lieu à un réchauffement moins prononcé, ce qui est conforme à son taux d’accroissement plus faible de la concentration de CO2.

A l’échelle de quelques décennies, on peut utiliser le taux de réchauffement actuellement observé pour limiter la réaction prévue à un scénario d’émissions donné, malgré l’incertitude qui caractérise la sensibilité du climat. Il semble ressortir de l’analyse des modèles simples et de la comparaison des réponses des modèles MCGAO à des scénarios de forçage théoriques que, pour la plupart des scénarios concernant les prochaines décennies, les erreurs propres aux projections de la température à grande échelle augmenteront en proportion de l’ampleur de la réponse globale. L’ampleur estimative des taux de réchauffement imputable à l’activité humaine actuellement observés et l’incertitude qui caractérise ces taux permettent donc d’obtenir une estimation relativement indépendante des modèles de l’incertitude des projections pluridécennales selon la plupart des scénarios. Pour concorder avec les observations récentes, le réchauffement anthropique devrait, selon le scénario IS92a, progresser de 0,1 à 0,2 °C par décennie au cours des prochaines décennies. Cette progression est comparable à l’ensemble des réponses à ce scénario fondées sur les sept versions du modèle simple utilisé à la figure TS 22.

La plupart des caractéristiques de la réponse géographique aux expériences concernant les scénarios SRES sont similaires pour les différents scénarios (voir la figure TS 20) et sont analogues à celles obtenues pour des intégrations idéalisées d’un accroissement de 1 pour cent du CO2. La plus grande différence entre les expériences fondées sur un accroissement de 1 pour cent du CO2 en l’absence d’aérosols sulfatés et les expériences concernant les scénarios SRES consiste en l’atténuation régionale du réchauffement dans les régions industrialisées pour ce qui est des expériences SRES, où le forçage négatif dû aux aérosols sulfatés est le plus prononcé. Cet effet régional n’est mentionné que pour deux modèles dans le deuxième Rapport d’évaluation, mais on le retrouve à présent dans la plupart des modèles récents.

Il est très probable que la quasi-totalité des terres connaîtront un réchauffement plus rapide que la moyenne mondiale, en particulier aux latitudes élevées de l’hémisphère Nord pendant la saison froide. Les résultats (voir la figure TS 21) des récentes simulations MCGAO selon les scénarios SRES A2 et B2 indiquent qu’en hiver, le réchauffement pour toutes les régions des latitudes élevées de l’hémisphère Nord dépasse la moyenne mondiale de plus de 40 pour cent dans tous les modèles (1,3 à 6,3 °C pour l’ensemble des modèles et des scénarios considérés). En été, le réchauffement dépasse de plus de 40 pour cent la variation moyenne mondiale en Asie centrale et septentrionale. Les modèles n’indiquent unréchauffement inférieur à la moyenne mondiale qu’en Asie du Sud et dans la pointe sud de l’Amérique du Sud en juin, juillet et août ainsi qu’en Asie du Sud-Est durant les deux saisons.

Résultats des modèles climatiques simples

En raison du coût des calculs, les simulations MCGAO ne peuvent être effectuées que pour un nombre limité de scénarios. Toutefois, un modèle simple peut être étalonné pour rendre compte des réponses des MCGAO moyennées à l’échelle du globe, puis appliqué à un nombre beaucoup plus grand de scénarios.

D’après les projections, la température moyenne mondiale de surface devrait augmenter de 1,4 à 5,8 °C (figure TS 22a)) durant la période 1990-2100. Ces résultats se rapportent à l’ensemble des 35 scénarios SRES et sont fondés sur un certain nombre de modèles climatiques.6, 7 Cette élévation de la température devrait être supérieure à celle qui figure dans le deuxième Rapport d’évaluation (environ 1,0 à 3,5 °C sur la base de six scénarios IS92). Ces projections faisant état de températures plus élevées et d’une plus large amplitude sont dues principalement au fait que les scénarios SRES prévoient de plus faibles émissions de SO2 que les scénarios IS92. Le taux de réchauffement projeté est bien supérieur à celui observé au XXe siècle, et il est très vraisemblable qu’il soit sans précédent depuis 10000 ans au moins, à en juger par les données paléoclimatiques.

Le classement des scénarios SRES en fonction de la température moyenne mondiale varie dans le temps. En particulier, pour les scénarios qui prévoient un usage intensif de combustibles fossiles (et par conséquent de fortes émissions de dioxyde de carbone, comme le scénario A2), les émissions de SO2 sont également plus élevées. A court terme (jusque vers 2050), l’effet de refroidissement des fortes émissions de dioxyde de soufre atténue notablement le réchauffement causé par les émissions accrues de gaz à effet de serre propres à des scénarios tels que le scénario A2. On constate l’effet inverse dans le cas des scénarios B1 et B2, qui prévoient de plus faibles émissions dues à la combustion de combustibles fossiles ainsi que de plus faibles émissions de SO2 et qui débouchent sur un réchauffement plus prononcé à court terme. En revanche, à plus long terme, le niveau des émissions de gaz à effet de serre à longue durée de vie, tels que CO2 et N2O, devient le facteur déterminant des changements climatiques.

D’ici à 2100, les différences des émissions prévues par les scénarios SRES et la disparité des réactions des modèles climatiques engendrent la même incertitude quant à l’ampleur de la variation de la température à l’échelle du globe. D’autres incertitudes découlent des incertitudes propres au forçage radiatif. La plus grande incertitude en matière de forçage a rapport aux aérosols sulfatés.


Autres rapports dans cette collection