Bilan 2001 des changements climatiques :
Mesures d'atténuation

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2.5 Examen des scénarios d’atténuation post-SRES

Compte tenu de l’importance des multiples scénarios de référence dans l’évaluation des stratégies d’atténuation, les études récentes analysent et comparent les scénarios d’atténuation en utilisant comme référence les nouveaux scénarios SRES. C’est ce qui permet d’évaluer dans ce rapport 76 “scénarios d’atténuation post- SRES” élaborés par neuf équipes de modélisation. Ces scénarios d’atténuation ont été quantifiés à partir des canevas relatifs à chacun des six scénarios SRES qui décrivent le rapport entre le type de monde futur et la capacité d’atténuation.

Figure TS.2 : Comparaison des scénarios de référence et de stabilisation. La figure est subdivisée en six parties, chacune correspondant aux groupes de scénarios de référence du Rapport spécial sur les scénarios d’émissions (SRES). Chaque partie de la figure illustre la gamme des émissions mondiales totales de CO2 (gigatonnes de carbone, GtC) de toutes les sources anthropiques pour le groupe de scénarios de référence SRES (ombré en gris) et les plages des divers scénarios d’atténuation évalués dans le TRE et aboutissant à la stabilisation des concentrations de CO2 à divers niveaux (ombrés en couleurs). Les scénarios sont présentés pour la famille A1 subdivisée en trois groupes (le groupe 1b) en équilibre (figure 2a)), le groupe A1T à prédominance de combustibles non fossiles (figure 2b)) et le groupe A1FI à forte intensité de combustibles fossiles (figure 2c)) et la stabilisation des concentrations de CO2 à 450, 550, 650 et 750 ppmv; pour la famille A2 moyennant une stabilisation à 550 et 750 ppmv à la figure 2d), pour la famille B1 avec stabilisation à 450 et 550 ppmv à la figure 2e) et pour la famille B2, avec stabilisation à 450, 550 et 650 ppmv à la figure 2f). Il n’existe aucune étude qui évalue les scénarios de stabilisation à 1000 ppmv. Cette figure témoigne du fait que plus le niveau de stabilisation est bas et plus les émissions de référence sont élevées, plus l’écart est important. La différence entre les émissions dans différents groupes de scénarios peut être aussi importante que l’écart entre les scénarios de référence et de stabilisation au sein d’un même groupe de scénarios. Les lignes en pointillé illustrent les limites des gammes où elles se recoupent (voir encadré N° 1).

Les quantifications divergent sous l’angle du scénario de référence, notamment du canevas présumé, de la cible de stabilisation et du modèle utilisé. Les scénarios post-SRES portent sur un très vaste éventail de trajectoires d’émissions, même si cet éventail est manifestement inférieur à celui du SRES. Tous les scénarios révèlent une hausse des réductions de CO2 avec le temps. La diminution de consommation d’énergie affiche un éventail beaucoup plus étendu que la réduction de CO2, car dans de nombreux scénarios, la modification des sources d’énergie primaire entraîne une dissociation entre la consommation d’énergie et les émissions de carbone.

En général, plus la cible de stabilisation est basse et plus le niveau des émissions de référence est élevé, plus la divergence doit être importante entre les émissions de CO2 et le niveau de référence et plus tôt celle-ci doit se produire. Les mondes A1FI, A1B et A2 exigent un éventail plus large de technologies et/ou de mesures stratégiques mises en œuvre avec plus de vigueur que les mondes A1T, B1 et B2. Le scénario de stabilisation à 450 ppmv réclame une réduction des émissions plus draconienne qui doit intervenir plus tôt qu’en vertu du scénario de stabilisation à 650 ppmv, moyennant une réduction des émissions très rapide au cours des 20 à 30 prochaines années (voir Figure TS.2).

La question stratégique clé est de déterminer les réductions d’émissions qui seront nécessaires à moyen terme (après la période d’engagement du Protocole de Kyoto). L’analyse des scénarios post-SRES (dont la plupart présument que les émissions des pays en développement seront inférieures aux niveaux de référence d’ici 2020) suggère que la stabilisation à 450 ppmv exigera que les réductions d’émissions dans les pays figurant à l’annexe 1 après 2012 dépassent de loin leurs engagements pris dans le cadre du Protocole de Kyoto. Cette analyse laisse également croire qu’il ne sera pas nécessaire que les pays figurant à l’annexe 1 dépassent de loin leurs engagements de Kyoto pour stabiliser leurs émissions à 550 ppmv ou à un niveau plus élevé. Il faut toutefois reconnaître que plusieurs scénarios révèlent la nécessité pour les pays figurant à l’annexe 1 de réaliser d’importantes réductions d’émissions d’ici 2020 et qu’aucun des scénarios n’introduit d’autres contraintes, telles que la vitesse des variations de température.

Une importante question stratégique déjà mentionnée a trait à la participation des pays en développement à l’atténuation des émissions. L’une des premières constatations de l’analyse des scénarios post-SRES est que si l’on présume que la réduction des émissions de CO2 nécessaire à la stabilisation ne doit intervenir que dans les pays figurant à l’annexe 1, les émissions de CO2 par habitant dans les pays de l’annexe 1 chuteraient en deçà des émissions par habitant dans les pays ne figurant pas à l’annexe 1 au cours du XXIe siècle en vertu de pratiquement tous les scénarios de stabilisation et, avant 2050, selon les deux tiers des scénarios, si les émissions des pays en développement concordent avec les scénarios de référence. Cela porte à croire que la cible de stabilisation et le niveau de référence des émissions sont deux facteurs décisifs dans le choix du moment où les émissions des pays en développement devront sans doute s’écarter de leur scénario de référence.

La politique climatique réduirait la consommation d’énergie finale par habitant dans les mondes qui mettent l’accent sur l’économie (A1FI, A1B et A2) mais pas dans les mondes qui mettent l’accent sur l’environnement (B1 et B2). La baisse de consommation d’énergie entraînée par les politiques climatiques serait plus importante dans les pays figurant à l’annexe 1 que dans les pays qui n’y figurent pas. Toutefois, l’incidence des politiques climatiques sur l’équité au niveau de la consommation d’énergie finale par habitant serait beaucoup moins importante que celle du développement futur.

Il n’existe pas de façon unique de parvenir à un monde futur de faibles émissions et les pays et les régions devront trouver leur propre voie. Les résultats de la plupart des modèles révèlent que les options technologiques connues5 permettront d’atteindre un vaste éventail de niveaux de stabilisation des concentrations atmosphériques de CO2, comme 550 ppmv, 450 ppmv ou en deçà au cours des 100 prochaines années ou plus, mais que la mise en œuvre nécessitera des changements socio-économiques et institutionnels connexes.

Les options d’atténuation présumées diffèrent selon les scénarios et sont lourdement tributaires de la structure du modèle. Cependant, les caractéristiques communes des scénarios d’atténuation sont une amélioration importante et continue de l’efficacité énergétique ainsi que le boisement et les sources d’énergies à faible teneur en carbone, en particulier la biomasse au cours des 100 prochaines années et le gaz naturel dans la première moitié du XXIe siècle. Les économies d’énergie et le reboisement sont des premières mesures raisonnables, mais il faudra finalement des technologies innovantes axées sur l’offre. Au nombre des options robustes possibles, mentionnons le gaz naturel et les technologies à cycle combiné pour faciliter le passage à des technologies plus évoluées utilisant des combustibles fossiles et n’émettant aucun carbone, comme les piles à hydrogène. L’énergie solaire ainsi que l’énergie nucléaire ou l’absorption et le stockage du carbone revêtiraient de plus en plus d’importance dans un monde où les émissions seront plus élevées et la cible de stabilisation sera plus basse.

Il se pourrait que l’intégration entre les politiques climatiques mondiales et les politiques nationales de réduction de la pollution atmosphérique réduisent effectivement les émissions de GES dans les régions en développement au cours des 20 à 30 prochaines années. Cependant, le contrôle des émissions de soufre risquerait d’accentuer les éventuels changements climatiques et tout indique que des concessions mutuelles partielles persisteront à moyen terme en ce qui concerne les politiques environnementales.

Pour atténuer les changements climatiques, on pourrait lier les politiques qui régissent l’agriculture, l’utilisation des terres et les systèmes énergétiques. L’approvisionnement en énergie tirée de la biomasse ainsi que le piégeage biologique du CO2 élargiraient les options disponibles pour réduire les émissions de carbone, même si les scénarios post-SRES indiquent que ces options ne peuvent assurer le gros des réductions d’émissions nécessaires. Il faudra pour cela faire appel à d’autres options.



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