Bilan 2001 des changements climatiques :
Les éléments scientifiques

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C.2 Changements observés pour d’autres gaz importants d’un point de vue radiatif

Ozone atmosphérique (O3)

L’ozone (O3) est un gaz à effet de serre de premier plan, présent aussi bien dans la stratosphère que dans la troposphère. Son rôle dans le bilan radiatif de l’atmosphère dépend fortement de l’altitude à laquelle se produisent des modifications de sa concentration, lesquelles modifications varient également dans l’espace. Par ailleurs, l’ozone n’est pas émis directement, mais se forme plutôt dans l’atmosphère à la suite de processus photochimiques faisant intervenir des gaz précurseurs d’origine naturelle et humaine. Une fois formé, il reste peu de temps dans l’atmosphère, son temps de séjour variant de quelques semaines à quelques mois. C’est pourquoi l’évaluation de son rôle sur le plan radiatif est plus complexe et bien moins sûre que celle concernant les gaz à effet de serre mentionnés précédemment, qui sont persistants et répartis de façon homogène à l’échelle du globe.

Durant les 20 dernières années, l’appauvrissement observé de la couche d’ozone stratosphérique a entraîné un forçage négatif de 0,15 ± 0,1 Wm-2 (c’est-à-dire une tendance au refroidissement) de la troposphère. Ainsi qu’il était indiqué dans Climate Change 1992: The Supplementary Report to the GIEC Scientific Assessment, l’appauvrissement de la couche d’ozone sous l’action des halocarbones anthropiques donne lieu à un forçage radiatif négatif. La valeur estimée de ce forçage indiquée à la figure TS 9 est légèrement supérieure à celle figurant dans le deuxième Rapport d’évaluation, du fait de la poursuite de la raréfaction de l’ozone ces cinq dernières années; elle est également moins entachée d’incertitude, en raison du nombre accru d’études de modélisation. Des études menées à l’aide de modèles de la circulation générale montrent que, malgré l’hétérogénéité des pertes d’ozone (notamment dans la basse stratosphère aux latitudes élevées), ce forçage négatif entraîne une baisse de la température à la surface du globe proportionnelle à son ampleur. C’est pourquoi, ces 20 dernières années, ce forçage négatif a compensé en partie le forçage positif dû aux gaz à effet de serre persistants et homogènes à l’échelle du globe (figure TS 9). L’une des principales causes d’incertitude dans l’estimation du forçage négatif est l’insuffisance des données sur l’appauvrissement de la couche d’ozone près de la tropopause. Les calculs sur modèles indiquent qu’une pénétration accrue du rayonnement ultraviolet dans la troposphère, par suite de la raréfaction de l’ozone stratosphérique, accentue le rythme auquel sont éliminés des gaz tels que le CH4, amplifiant ainsi le forçage négatif dû à l’appauvrissement de la couche d’ozone. Selon les projections, à mesure que la couche d’ozone se reconstituera durant les prochaines décennies grâce à l’application du Protocole de Montréal, le forçage radiatif lié à l’ozone stratosphérique deviendra positif.

On estime que le forçage radiatif mondial moyen dû à l’accroissement de la concentration de l’ozone troposphérique depuis l’ère préindustrielle a fait progresser de 0,35 ± 0,2 Wm-2 le forçage dû aux gaz à effet de serre anthropiques. Ceci fait de l’ozone troposphérique le troisième gaz à effet de serre, par ordre d’importance, après le CO2 et le CH4. L’ozone se forme par suite de réactions photochimiques, et son évolution future sera conditionnée, entre autres, par l’importance des émissions de CH4 et de polluants (comme il est indiqué ci-après). Les variations des émissions de polluants se répercutent assez rapidement sur la concentration d’ozone. D’après les quelques observations dont on dispose et plusieurs études de modélisation, il semble que la concentration d’ozone troposphérique a augmenté d’environ 35 pour cent depuis l’ère préindustrielle, avec certaines disparités selon les régions. Depuis le milieu des années 80, rares sont les cas où l’on a enregistré un accroissement de la concentration d’ozone pour ce qui est de la troposphère globale dans les quelques emplacements éloignés où ce paramètre est mesuré régulièrement. La stabilité de la concentration au-dessus de l’Amérique du Nord et de l’Europe est liée à la stabilité des émissions de gaz précurseurs de l’ozone en provenance de ces continents. Par contre, certaines stations d’Asie ont apparemment enregistré un accroissement de l’ozone troposphérique, qui pourrait être lié à l’augmentation des émissions dans l’Est asiatique. La multiplication des études de modélisation entreprises a contribué à améliorer la fiabilité des estimations du forçage dû à l’ozone troposphérique. Le degré de confiance accordé à ces estimations est cependant beaucoup moins grand que celui qu’inspirent les estimations relatives aux gaz à effet de serre homogènes, même s’il est supérieur à celui qui concerne les estimations du forçage dû aux aérosols. Ces incertitudes découlent de l’insuffisance des informations disponibles, tant à propos de la répartition de l’ozone à l’ère préindustrielle que dans l’optique d’une simulation de l’évolution mondiale de ce gaz à l’époque moderne (c’est-à-dire depuis 1960).

Gaz à effet radiatif indirect

Plusieurs gaz chimiquement réactifs, notamment les oxydes d’azote réactifs (NOx), le monoxyde de carbone (CO) et les composés organiques volatils (COV), influent sur la capacité d’oxydation de la troposphère et l’abondance de l’ozone. Ces polluants jouent le rôle de gaz à effet de serre indirect en raison de l’influence qu’ils exercent non seulement sur l’ozone, mais aussi sur la durée de vie du CH4 et d’autres gaz à effet de serre. Les émissions de NOx et de CO sont essentiellement d’origine humaine.

Le monoxyde de carbone est considéré comme un important gaz à effet de serre indirect. D’après les calculs sur modèles, pour ce qui concerne les perturbations dues aux gaz à effet de serre, l’émission de 100 Mt de CO équivaut à une émission de 5 Mt environ de CH4. Le CO est à peu près deux fois plus abondant dans l’hémisphère Nord que dans l’hémisphère Sud, et sa concentration s’est accrue durant la seconde moitié du XXe siècle sous l’effet de l’industrialisation et de la croissance démographique.

Les oxydes d’azote réactifs NO et NO2 (regroupés sous l’appellation NOx) sont des composés clés dans la chimie de la troposphère, quoique leur effet radiatif global reste difficile à chiffrer. L’importance des NOx dans le bilan radiatif tient au fait que l’accroissement de leur concentration a des répercussions sur plusieurs gaz à effet de serre et peut par exemple entraîner une diminution du méthane et des HFC et une augmentation de l’ozone troposphérique. Les dépôts des produits de réaction des NOx fertilisent la biosphère et font baisser la concentration de CO2 dans l’atmosphère. Bien qu’elles soient difficiles à chiffrer, les augmentations de NOx prévues jusqu’en 2100 devraient avoir d’importants effets sur les gaz à effet de serre.



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